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Un texte, il est là, il vient, se construit, idée après idée.

Les pas

Les pas

Au détour d’une ruelle, même si je ne la vois pas encore, je perçois le rythme caquetant de son pas sur le trottoir gris et sale. Je sais qu’elle porte ses petits escarpins rouges à talon que j’affectionne tant. Je la reconnais entre mille, ses chaussures sont comme elle, elles s’empressent de me retrouver. Je sais la façon qu’elle a de se mouvoir, le balancement de ses hanches, comme si elle voulait se libérer de mes mains qui enserrent sa taille. Je devine son jupon, lui aussi épris de liberté, qui se froisse et balaye ses jambes dans un infini va-et-vient. Je la sais tête haute et sourire radieux. Elle accélère son pas, je la voudrais déjà dans mes bras.

La foule de passants anonymes et sans intérêt déambule, aspirée par un quotidien qui assourdit leurs pas. Mais qu’importe s’ils ne sont pas ou plus aujourd’hui les "espérés" d’une oreille amoureuse qui se délecte de les entendre. Quel bonheur indicible, de savoir que ce pas qui vole et qui chante sur le bitume est pour moi. Je suis redevenu, l’espace d’un instant, un enfant qui joue à cache-cache, presque absorbé par la lourde porte cochère de la rue des Moissons. Mon cœur s’emballe, elle est si près, je sens son parfum envoûtant qui se mêle à chacun de ses pas. Elle est si près.

Je tends les mains pour attraper sa taille, je la soulève et elle laisse tomber un de ses escarpins rouges. Je me penche pour le ramasser, il est là, seul, abandonné sur le trottoir. Ma main effleure la finesse de sa cheville, en replaçant la chaussure sur son pied délicat. Je sens la chaleur de sa peau. Elle rit. Son rire est si véritable, si simple. J’aimerais que ce moment devienne éternité. Éternité dans mon cœur, dans mon corps tout entier. Qu’aucun rivage de mes souvenirs ne puisse le détruire. Qu’il reste intact dans ma mémoire, qu’il se promène et ressurgisse, qu’il ondoie dans ma tête, qu’il s’embellisse et qu’il ait toujours ce goût sucré. Que mon passé ne l’inscrive qu’au présent, et que jamais il n’ait le goût de l’oubli.

©lo

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D
<br /> et puis aussi, on vit la scène en même temps qu'on la lit! c'est très beau!<br /> <br /> <br />
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D
<br /> et bien! quel beau texte! tu devrais publier un recueil!!! si si!<br /> <br /> <br />
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